L'approche systémique en entreprise
Pour revenir sur cette question fil rouge de la connaissance de soi comme prérequis à tout changement durable, et plus particulièrement les leviers de motivation à mettre en action, les méthodes ne manquent pas.
Bien que non exhaustifs, les apports théoriques qui suivent ont pour objectif d’observer la problématique sous l'angle de la systémique.
L’approche systémique : les apports de Peter Senge – La Cinquième Discipline
L’organisation apprenante est une théorie qui ne peut aujourd’hui être ignorée des organisations désireuses de s’orienter vers de nouveaux modèles de fonctionnement et d’apprentissage. Né des travaux de Chris Argyris (Professeur américain ayant enseigné à Yale puis à Harvard. Théoricien des Organisations) et de Peter Senge (Auteur américain et Professeur de Management), le concept et la pratique de l'organisation apprenante se sont développés tout au long des années 90 et 2000 dont la réflexion porte sur le « comment apprendre ».
Zoom sur La Cinquième Discipline, comme apport sur les leviers de réussite de l’entreprise apprenante, nouveau modèle des organisations.
Dans son ouvrage intitulé « La Cinquième Discipline » Peter SENGE, décrit ce que sont donc les organisations « intelligentes », celles qui luttent contre le cloisonnement et la dilution de leurs forces pour penser et travailler de manière globale. Son ouvrage s’adresse aux manageurs désireux d’élever le niveau de performance de leur organisation en y associant leurs collaborateurs dans un véritable esprit d’équipe.
Depuis l’enfance, notre système de pensée tend au fractionnement des problèmes, et nous amène à diviser le monde en sous-ensembles pensant que c’est le moyen le plus efficace pour gérer des sujets complexes.
Son ouvrage vient prétendre le contraire, en proposant l’idée que le monde est constitué de forces liées entre elles, qui permettent l’émergence des organisations apprenantes, au sein desquelles les membres « apprennent en permanence comment apprendre ensemble ».
Ces organisations apprenantes se distinguent alors des organisations traditionnelles fondées sur l’autorité et le contrôle, par un certain nombre de disciplines de bases.
Cette aptitude est étroitement liée à notre niveau de compétences personnelles, c’est à dire à notre savoir-faire. Elle peut aussi se définir comme notre capacité à se dominer. C’est par la connaissance et la maîtrise de soi que nous pouvons atteindre nos objectifs. Par cette discipline, on apprend à approfondir notre approche des choses et à concentrer toute notre énergie sur la réalisation de nos projets.
La maîtrise personnelle trouve sa source dans la compétence et le talent, au-delà de l’ouverture d’esprit et de l’épanouissement spirituel. La discipline englobe deux attitudes : d’une part préciser en permanence ce qui est important pour nous, d’autre part analyser avec plus de lucidité notre réalité quotidienne. Le développement émotionnel est primordial dans la mesure où il offre le levier le plus puissant de réalisation de son potentiel.
Nous avons certes des buts et des objectifs mais ce ne sont pas des visions, ce qui fait que nous nous attardons bien plus sur les moyens que sur les résultats. Ce concept ne peut alors être dissocié de la finalité, c’est-à-dire la raison pour laquelle nous sommes venus sur terre (selon le principe de la bienveillance sincère, le bonheur n’est sans doute rien d’autre que le fait de vivre en accord avec sa finalité).
Quand il évoque la connaissance et la maîtrise de soi, l’auteur élargit son propos à ce qu’il nomme la sollicitude authentique. Il s’agit de la capacité à se concentrer sur un but ultime, pierre angulaire de la maîtrise personnelle, mais qui reste abstraite car c’est juste une orientation. Le but ultime reste néanmoins précis, incarnant la vision, la destination (qui elle doit être concrète). La principale qualité de la maîtrise personnelle est de rester fidèle à cette vision. Il s’agit de regarder la réalité en face. La juxtaposition entre la vision recherchée et une analyse lucide de la réalité, c’est à dire là où nous en sommes par rapport à ce que nous désirons, donne lieu de manière surprenante à l’émergence d’une tension créatrice.
La maîtrise personnelle fait appel implicitement au subconscient. Celui-ci permet de gérer la complexité, il doit donc être utilisé là où il n’est pas besoin de tout comprendre. C’est ce qui distingue les individus à forte maîtrise personnelle. La pensée systémique permet de comprendre la nécessaire intégration entre raison et intuition.
L’un des secrets du développement personnel tient à la capacité de boucler des boucles : accepter le principe que des forces apparemment étrangères dépendent en fait de nos actions.
Le défi de l’apprentissage décrit par Einstein évoque également la notion de l’élargissement du « cercle de la compassion ». Ici la compassion doit être appréhendée comme la prise de conscience, que nous ne sommes pas les victimes des systèmes puisque c’est nous qui avons créé ces structures.
Autre considération, la pratique de la maîtrise personnelle nécessite d’avoir toujours une attitude positive, en restant soi-même, en gardant confiance en soi et en ses collaborateurs.
Enfin, pour introduire la maîtrise de soi, dans une organisation, il ne faut absolument rien imposer. Le développement personnel est une affaire de choix. Chacun doit se sentir libre d’apprendre à se connaître et à évoluer. Cet enrichissement personnel n’est alors possible que dans un environnement propice, empreint d’un minimum de liberté. L’expression des avis personnels, comme ailleurs, doit être sans cesse encouragée. Il convient d’accepter d’écouter les autres et de favoriser par son comportement le dialogue et les échanges. L’ultime facteur de réussite de cette maîtrise personnelle, est l’exemplarité qui doit être démontrée par les membres de la Direction de toute organisation.
Partant du principe que les stratégies les plus remarquables restent à l’état de théorie du fait que les réflexions systémiques ne parviennent pas à se transformer en principe d’actions, apparait la deuxième discipline. Elle se résume comme la capacité à « remettre en question ses modèles mentaux », c’est-à-dire ses idées préconçues. Elle nous permet d’échapper à nos fixations culturelles, celles-ci étant surtout d’ordre éducationnel. Il s’agit de sortir des aprioris et des préjugés. Au niveau managérial, il s’agira des modes d’organisation réplicatifs où le renoncement aux modèles mentaux nécessite d’accepter de se diriger vers les autres, leurs idées, et par conséquent de s’autoriser à explorer de nouveaux champs d’interprétation… donc de liberté.
Les modèles mentaux nous empêchent de sortir de notre zone de confort et de prendre des initiatives en dehors de celles que l’on déjà expérimentées. Ils peuvent même nous conforter dans la résistance au changement. En ce qui concerne le management, la question reste celle d’être en mesure d’imaginer d’autres modes de fonctionnement, d’échanges d’informations, de discussions, de confrontation avec les autres et finalement de prise de décision. Les innovations sont malheureusement limitées par l’image habituelle que l’on se fait du monde, par des croyances et des grilles de lectures profondément ancrées en nous, celles qui limitent nos pensées et influencent nos actes. Ce sont nos modèles mentaux qu’il convient de remettre en cause pour retrouver un esprit critique et davantage de liberté d’action.
Tant que nous ne prenons pas conscience de nos sauts conceptuels, nous passons à côté de la nécessité de l’exploration, c’est ce qui rend la discipline de la réflexion si importante.
Travailler sur le non-dit est une méthode efficace pour la compréhension du fonctionnement de nos modèles mentaux face à des situations particulières.
Pour lutter contre cela, il existe donc des règles de « savoir-faire » et de « savoir-vivre » dont il faut pouvoir s’inspirer. Dans le premier cas, il est important de différencier ce que l’on observe, de ce que l’on croit voir. Il s’agit de différencier le non-dit de ce qui est effectivement exprimé. Dans le deuxième cas, le savoir-faire est celui d’apprendre à rester objectif en menant de réelles investigations. Il faut pour cela s’habituer à expliciter son raisonnement et argumenter par rapport aux faits sur lesquels il repose, et s’inspirer des autres en écoutant attentivement ce qu’ils disent. En résumé, il faut inviter les membres de son équipe à une nouvelle façon d’interagir au quotidien, tant au niveau du travail qu’à celui de ses interactions avec les autres, tout cela pouvant devenir source d’un apprentissage créatif.
Lorsque la vision est partagée et surtout lorsqu’elle est intériorisée, les aspirations de chacun prennent leur essor.
La troisième discipline est donc celle de la « vision partagée » qui est liée à la définition d’un projet collectif. Comme son nom l’indique, elle propose de partager une même vision de l’avenir, de ce que nous désirons créer ensemble. La vision partagée implique nécessairement un engagement de chacun basé sur le dynamisme et l’envie et non sur le fait de suivre simplement ce qui est dicté par les appréhensions du quotidien ou les craintes du futur.
Pour réussir dans cette discipline, l’auteur nous invite à encourager les visions personnelles et à favoriser leur transition vers la vision partagée. Une organisation dite « intelligente » doit d’abord aider chacun de ses membres à définir, puis adopter sa vision personnelle.
Ensuite, pour passer de cette vision personnelle à la vision partagée, il faut que cette dernière soit construite en équipe, autrement dit co-construite. Cela nécessite que le groupe tienne constamment compte de la vision de chacun de ses membres, mais aussi de l’ensemble des visions personnelles, et qu’il puisse s’adapter aux 5 attitudes évoquées par Peter Senge à savoir : l’engagement, l’adhésion, la collaboration sincère, l’obéissance rétive, l’apathie et la rébellion. Cette vision partagée une fois construite (équivalente au « quoi »), il faut y ajouter sa vocation, sa raison d’être (qui correspond au « pourquoi ») et ses valeurs, (synonymes du « comment »). Ces notions directrices sont indispensables pour mobiliser l’engagement et les énergies de tous dans une même direction avec un esprit d’équipe. Elles permettent surtout la réalisation d’un projet collectif abouti.
Cette quatrième discipline encourage à l’écoute active et au dialogue constructif. Elle stimule les interactions dans un groupe en générant une réelle capacité à apprendre de chacun. Elle peut aussi transformer un groupe d’individus, (une somme de talents), en une véritable équipe composée de collaborateurs ayant l’envie d’apprendre ensemble. L’esprit d’équipe et la cohésion sont évidemment un prérequis.
Comment faire alors pour que l’intelligence d’une équipe se développe ? Comment transformer un groupe en organisation « intelligente », ce système qui permette à chacun de ses membres de se développer ?
Selon Peter SENGE, « apprendre en équipe signifie apprendre à… apprendre ensemble ! ». C’est une discipline basée sur la pratique et en des lieux d’expérimentation souvent bien déterminés. L’apprentissage en équipe est la discipline qui produit l’unité d’action. Elle permet au potentiel d’intelligence de chacun de ses membres de diffuser à travers le groupe et plus largement dans son environnement de travail. Le talent de l’équipe devient alors supérieur à la somme des talents individuels. Pour ce faire, il convient de pratiquer de manière équilibrée le dialogue, puis la discussion. C’est uniquement lors de la discussion, dernière phase du processus, que l’on pourra déboucher sur des décisions raisonnées et donc plus souvent efficaces.
Au final, ce qui nuit à la pensée collective est la tendance à fragmenter les problèmes, à séparer les éléments d’une réflexion. La démarche d’équipes apprenantes face aux routines est essentiellement systémique. Les managers sont conduits à des actions à faible effet multiplicateur de par notre langage simple et linéaire entre une cause et un effet.
La cinquième discipline est à la fois la dernière et toutes les cinq à la fois. Il s’agit de « la pensée systémique », soit la pratique au minimum des quatre disciplines. Mais ce n’est pas tout. C’est elle qui permet de les combiner afin d’aboutir à un mode de management global. Elle agit de sorte que le résultat obtenu par des méthodologies qui permettent d’apprendre aussi bien de soi que des autres représente bien plus que la somme de quatre disciplines, aussi efficaces soient-elles chacune. La cinquième discipline est donc la plus complexe car elle suppose de commencer à maitriser les quatre premières.
La pensée systémique est une discipline qui consiste à voir les phénomènes dans leur intégralité. Elle permet d’étudier les interrelations plutôt que les éléments individuels, d’observer des processus de changement plutôt que des images statiques. C’est également un état d’esprit nécessaire aujourd’hui plus que jamais face à la complexité qui nous dépasse.
Elle est la 5ème discipline car elle est la pierre angulaire conceptuelle sur laquelle se fondent les 4 autres.
Nous voyons à ce stade que les apports théoriques sont riches d’enseignement en matière de développement des organisations en général, et de la personne en particulier.
Pour Peter Senge, l’ouverture d’esprit précède la pensée systémique... et vous alors, Manager, Dirigeant ou RH d'une entreprise, qu'en pensez vous ?
Merci d'avoir pris le temps de lire cet article.
En espérant que vous y aurez trouvé des informations ou des pistes de réflexion qui viendront nourrir votre Développement Personnel & Professionnel.
N'hésitez pas à commenter et à partager cet article.
Coachement vôtre.
XLLS